It's been a while, Ôji-sama

— Je suppose que mes chances de sortir d’ici en un morceau sont assez minces, mais ma curiosité l’a emportée, une fois de plus, sur mon instinct de survie.

Il est difficile de déchiffrer les expressions d’HellRoy Jadziah, mais un sourire se dessine sur les lèvres de Kaarasu quand il lui tend un verre de gin. Ça ne peut être que bon signe, non ? On propose rarement un verre à quelqu’un que l’on est sur le point d’abattre.

— On vient souvent me demander des… ‘’ressources’’, dit-il avec un mépris évident.

Croit-il que Kaarasu s’est donné autant de mal pour venir lui quémander de l’argent ? Il y a quelque chose d’amusant dans cette idée. Le brun se promet de faire le test, tôt ou tard, rien que pour voir sa réaction.

— Disons que j’accepte votre proposition… Si je suis déçu, je m’assurerais que vous ne puissiez plus jouer de sales tours, oui? 

L’informateur soutient son regard de façon calme et composée, souriant distraitement sous ses menaces latentes. Il acquiesce sagement, comme un enfant sur les bancs d’école. Bien entendu, cette collaboration est très risquée, mais elle pourra lui ouvrir tellement de portes jusque là hermétiquement closes. Il jubile intérieurement.

— Alors qu’attendez-vous de moi, exactement, Takami?

Victoire.

— Pour le moment, j’aurais besoin de ton aide pour retrouver certaines personnes… disparues ?

Il lui tend une feuille pliée en quatre sur laquelle s’étend une courte liste de noms, ainsi qu’un numéro de téléphone. Des gens de son milieu, qui semblent avoir complètement disparu de la civilisation depuis des années, se retirant peut-être pour une vie plus tranquille.

— Dis-moi, tu crois aux fantômes, Ô-Sama ?

Il s’éloigne et regagne son fauteuil, incommodé par la fumée de cigarette que son ainé souffle directement dans son visage.

— Il y a six ans, le précédent PDG de Mirai Inc, Andri Mirai, est décédé dans des circonstances, pour le moins, suspectes. On dit que Jonathan Mirai aurait engagé un tueur à gages pour se débarrasser de son propre père, le jour de ses 21 ans. Tu ne trouves pas ça terrible ?

Kaarasu sait que le maitre Jadziah a un fils qui ne doit pas être bien plus vieux que Nate. Il se demande si la confiance règne entre eux où s’ils sont aussi sournois qu’ont pu l’être les Mirai.

— Et si quelqu’un avait envie de ramener le défunt père, histoire de faire une petite frousse au fils ingrat ?

À sa façon, bien sur. Il rit et se lève pour partir, imaginant une vieille version de Jonatan sous un drap blanc et affublé de chaines. Il n’a pas touché au verre de gin.

— Tu peux me rejoindre à ce numéro si tu trouves quoique ce soit. Si non, ça n’est pas bien grave, ton nom à lui seul devrait me servir de clé pour entrer là où il faut.